Au cours des dernières années, le débat public contemporain a révélé les confusions qui
entourent l’idée que l’individu est réputé jouir – ou devoir jouir – de droits subjectifs. Or, les
notions qui structurent le débat public trouvent une signification différente selon qu’elles sont
employées dans les discours académiques, journalistiques ou politiques. Un premier objectif
de ce cours sera, au moins, de permettre aux étudiants de saisir plus clairement les contours
de ces controverses pétries de confusions.
En effet, que faut-il entendre au juste par « droits de l’Homme » – quel Homme ? Chaque être
humain ? Comment se distinguent-ils des droits « naturels » ou « moraux » ? Substituer la
notion de droits « humains » à celle droits de l’« Homme » relève-t-il d’une démarche
« d’inclusivité » ? Est-ce une stratégie efficace ?
Surtout, quel lien faut-il établir avec la reconnaissance officielle – « positive » ou « juridique » –
des droits de l’Homme par l’État sur son territoire ? Les droits de l’Homme peuvent-ils
s’imposer de leur propre autorité ou nécessitent-ils un relai dans l’ordre juridique étatique pour
s’appliquer ? S’agit-il alors d’une simple « transposition », ou l’État a-t-il la maîtrise du
processus ?
Mais alors, ne faut-il pas penser tout d’abord l’autorité de l’État sur son territoire ? Les droits
de l’Homme ne deviennent-ils pas tributaires de l’État dont ils visent pourtant, pour partie, à
limiter le pouvoir ? Et dans ce cas, quel rôle peut-on espérer faire jouer au droit international
réputé porteur des valeurs des droits de l’Homme ?
Pour toutes ces questions, nous chercherons à exposer patiemment quelques-unes des racines
intellectuelles de nos débats contemporains et verrons que, derrière l’hétérogénéité apparente
des thèmes abordés, les développements contemporains sont le résultat, sur le temps long, de
l’apparition de la conception moderne de l’individu et des droits qu’on lui prête.